Le thème du vieillissement a souvent été abordé en France sous l’angle du risque : le risque sociétal face à une pyramide des âges qui se déséquilibre et qui pose la question de la bonne entente possible entre des générations aux intérêts parfois divergents ; le risque budgétaire pointé par des caisses sociales inquiètes devant un rapport actifs/retraités défavorable et qui ne cesse de se dégrader ; le risque économique enfin, incarné par une France qui vieillit alors même que jeunesse et dynamisme semblent être les attributs incontournables de toute grande puissance qui veut (main)tenir son rang. Pourtant, si plutôt que de se complaire dans une interprétation plus ou moins catastrophiste des chiffres et dans des constats à courte vue, nous tentions de voir le vieillissement de la population comme une réelle opportunité à saisir ? Face aux crises industrielles et agricoles que nous subissons, le potentiel que représente le développement d’une économie liée à la présence d’une population vieillissante semble être en effet une chance à ne pas rater. Or que constate-t-on ? Si contrairement à ce que l’on aurait pu croire, les services à la personne ne constituent pas un réservoir d’emplois miracle susceptible de résorber le chômage et de redynamiser l’économie en quelques années, il n’en reste pas moins que le vieillissement de la population française pourrait constituer l’un des principaux moteurs de notre économie, et ce au moins pour les trente ans qui viennent. Car de quoi parle-t-on lorsqu’on parle de vieillissement ? On parle tout simplement de la capacité de notre société à intégrer dans son fonctionnement une part croissante de la population qui ne produit plus ou qui produit autrement, mais qui consomme toujours. Et qui consomme parfois plus que la population dite « active », dont le temps disponible pour consommer est forcément plus rare, et dont l’un des soucis récurrents est d’épargner… pour sa retraite ! On entend régulièrement parler des « petites retraites », des « maigres pensions », et de la difficulté – souvent réelle – des personnes âgées à vivre décemment. Certes. Mais si ce constat est avéré pour beaucoup, il n’en reste pas moins réducteur ; en effet, la population qui prend sa retraite aujourd’hui est celle des baby boomers qui ont vécu les trente glorieuses et assez peu subi les affres du chômage. Les générations qui la suivent sont certes plus affectées par les soubresauts d’une croissance fragilisée et connaissent en plus grand nombre des périodes d’inactivité : mais avec la généralisation du travail pour un nombre croissant de femmes, ces générations voient également un nombre croissant de couples bi-actifs, qui constitueront demain des retraités bipensionnés. On le voit : l’analyse du pouvoir d’achat des retraités est un exercice extrêmement complexe dont il faut bien se garder de tirer de trop hâtives conclusions. Nos convictions sont donc ailleurs, et elles sont multiples.